Des nouvelles du monde civilisé... ou La peine de mort, la justice et nous, le peuple
Robert Badinter, Garde des Sceaux sous François Mitterrand, Avocat, Professeur de droit est ce que j'appellerais un grand Homme.
Pour avoir lu nombre de textes de lui, notamment L'exécution et L'abolition, je dirais que j'adhère à la vision qu'il a de la justice, de ses acteurs ou, d'une manière plus large, du droit.
Sans avoir jamais vu en lui un auteur aux qualités littéraires particulièrement développées, je lui reconnais le mérite indéniable de savoir, en quelques mots, graver une image forte dans l'espris de ses lecteurs.
Françoise me fait l'amitié de m'autoriser à vous faire partager ses impressions de lecture de cet ouvrage, je luisse laisse donc la parole en même temps que je la remercie.
Après avoir lu, et relu, l’abolition de Badinter,
qui pose la question de la peine de mort, j’y vais de mes petits
commentaires.
Aborder cette grande question sous la forme d’un célèbre
procès qui s’est tenu en novembre 1972 est intelligent : le lecteur connaît
déjà le verdict, la fin du procès, donc du livre, mais Mr BADINTER retrace les
méandres de la justice, ses contradictions et cette volonté d’être au-dessus
de tout, au dessus du rapport qui prouve que Bontemps n’a pas tué (rapport
d’expertise annulé pour vice de forme : les experts avaient émis une opinion en
conclusion, mais tout le rapport retrace avant, pendant, après la scène des
crimes).
Deux pas en avant, deux pas en arrière, un avocat a peine à
avancer : défendre un homme est tellement grave dans le sens d’important pour
son client (le mot de client, Badinter ne l’emploie jamais).
Puis la
conviction naît ; c’est comme une longue marche qui finit avec: « BONTEMPS
n’a pas tué, on ne tue pas celui qui n’a pas tué. »
« Rappelle-toi que
c’est toujours plus facile de condamner que d’acquitter » OU « exécuter est plus
commode que de laisser vivre »
« La haine fait douter de tout, et
d’abord de la justice que la haine applaudit – Clameurs et applaudissements
saluaient la condamnation de BUFFET et de BONTEMS »
« Le Président de la
République aura laissé passer la justice du peuple. Mr POMPIDOU avait déjà
gracié des condamnés dont les crimes de sang étaient atroces »
Robert Badinter
la Cour d'Assises avait reconnu que BONTEMS n’avait pas tué !
Et puis il y a l’ultime recours que BUFFET n’acceptait pas : être
gracié. Mais BONTEMS si, il y a cru autant que son avocat. L’ultime chance de vie a été tuée par le fait que le Président de
la République, Monsieur Georges Pompidou, a voulu suivre l’avis du peuple
français et n’a pas voulu gracier BONTEMS (En 1972 ). Dans un autre sondage
IFOP, 27% des sondés seulement étaient contre la peine de mort et 63% pour.
Enfin, un sondage du Figaro publié le lendemain du
vote de la loi d'abolition du 9 octobre 1981 indiquait que 62% des
français étaient pour le maintien de la peine de mort. Cela fait froid dans le dos, sinon plus !
Le peuple français était d’accord avec le verdict: la mort pour Bontemps. Un sondage (commandé par qui ?) démontrait que le peuple est pour la peine de mort. Et l'erreur, où est sa place ? Est ce que la justice peut se tromper ? Etre influencée ? Je réponds oui tout de go !
« EXECUTER est plus commode que de laisser vivre
»
Les 20 dernières pages sont aussi belles que les 200
précédentes.
La dernière liberté donnée dans ce procès, est donné à
l’avocat : qui de Bontems ou de Buffet doit passer en premier à la guillotine
? Vous qui savez que BONTEMS n’a pas tué, on ne tue pas celui qui n’a pas
tué » Quelle ironie !
Les larmes me sont montées comme si je ne
connaissais pas la fin du livre ! Comme si, j’espérais une autre issue ! Voilà
où est la force de livre, ou est la force de Monsieur Robert Badinter,
avocat.
Et là... j’ai toujours un doute sur notre (je veux
dire l'opinion française) acceptation de l’abolition de la peine de mort. Elle
est fragile.
Nous devons être très vigilants.
De 1984 à 1995, 27 propositions de loi
visant à rétablir la peine de mort sont déposées au Parlement.
Plus récemment,
en 1998, selon un sondage de
l'institut IFOP, 54 % des français sont hostiles à la peine de mort. 54%, ce
n'est rien, 4% vont et viennent au file de l'actualité.
Comme tout
sondage sur un sujet de société aussi sensible, l'opinion publique (et dans ce
cas l'opinion française) est assez changeante en fonction de l'actualité. Les
différents sondages réalisés au cours de l'Histoire ont montré que lors de
crimes odieux (particulièrement lorsqu'ils touchent des enfants), l'opinion peut
vite revenir à une majorité pour le rétablissement de la peine
capitale.
Le 3 mai 2002, la France signe, avec
30 autres pays, le Protocole numéro 13 à la Convention européenne des droits de
l'homme.
Ce texte interdit la peine de mort en toutes circonstances, même en temps de
guerre. Il est entré en vigueur le 1er juillet 2003 , après le dépôt de 10
ratifications.
On sort bouleversée de ce procès et au fil des
propositions de loi, au vue de certains dires de représentants politiques, il
s'avère que dans ce domaine, rien n'est jamais joué.